Objets du culte / Rites et traditions

L’armoire de sacristie : Les objets sacrés et leur signification (3e et dernière partie)

* Dernière partie de trois articles * Pour les néophytes, pour ceux qui ont oublié, ou tout simplement pour les curieux : voici, en trois parties, une petite présentation des objets et meubles liturgiques les plus importants. À quoi servent-ils? Comment sont-ils faits? À quels rites sont-ils associés? La sacristine fouille dans son armoire pour vous répondre.

Les crucifix

Crucifix de procession

À la différence, par exemple, de la plupart des églises protestantes qui privilégient les croix sans corpus (représentation du corps du Christ cloué à la croix), les églises catholiques arborent le plus souvent un ou plusieurs crucifix avec corpus. Il s’agit de garder à la mémoire des chrétiens que le salut est devenu possible grâce au sacrifice du Christ, et que la résurrection s’obtient en passant d’abord par la Passion de la croix.

Il existe des crucifix de procession, que l’on peut voir notamment lors de la procession au début de la messe, des crucifix d’autel, posés sur la table où s’exécute le sacrifice de la messe, et de grands crucifix d’église présentés à la vénération des paroissiens, sur un côté de la nef ou du sanctuaire. Durant la cérémonie du Vendredi Saint, jour de la crucifixion du Seigneur, on approche ce grand crucifix des fidèles pour qu’ils le touchent ou l’embrassent.

Grand crucifix

Les livres sacrés 

Cérémonial de l’Évangéliaire. Source : Wikipédia.

Plusieurs livres sont utilisés pour célébrer la messe. Parmi ceux-ci, le plus important est l’Évangéliaire, porté solennellement en procession au début de la cérémonie puis déposé sur l’autel. Ce livre contient les textes des Évangiles, qui relatent la vie et l’enseignement de Jésus, et dont on lit un extrait à chaque messe. Le cœur du cérémonial de l’Évangéliaire est le moment où le livre est transporté de l’autel jusqu’à l’ambon (pupitre ou lutrin où on fait les lectures), pendant le chant de l’Alléluia. À la fin de la lecture, les fidèles acclament la Parole de Dieu et le prêtre embrasse le livre, ou fait un signe de révérence.

On distingue l’Évangéliaire du Lectionnaire, qui contient les autres textes bibliques lus pendant la messe.

Missel. Source : Répertoire du patrimoine culturel du Québec.

Enfin, le Missel à l’usage des fidèles est le livre liturgique contenant tous les textes de la messe : lectures, prières et chants (et même des indications pour les gestes que l’on doit faire). Le célébrant a lui aussi son missel à l’autel, qui ne comprend pas les lectures. Aujourd’hui, dans la plupart des églises québécoises, on place à l’entrée des petits livrets brochés faisant office de missel (le Prions en Église) à la disposition des paroissiens, quoique plusieurs préfèrent encore apporter le leur.

Les sièges

Prie-Dieu

Vous remarquerez que le chœur de l’église comprend plusieurs sièges, qui sont parfois des pièces de mobilier exceptionnelles. Les rangées de sièges fixes en bois, souvent sculpté, qui font le tour du chœur sont appelées stalles et sont destinées aux membres du clergé ou aux religieux. Aujourd’hui, les laïcs qui exercent un ministère liturgique s’y assoient également. Dans les cathédrales, on peut voir un trône épiscopal, siège plus élaboré, réservé à l’évêque. Les bancs d’église, placés dans la nef, sont dotés d’un agenouilloir. Quant aux prie-Dieu, qui peuvent être utilisés à l’église ou d’usage domestique, ils présentent une partie basse coussinée pour s’agenouiller, et sont surmontés d’un accoudoir.

Stalles

Trône épiscopal

 

D’autres objets d’église

Fonts baptismaux

Un autre objet d’importance, mais moins visible à cause de son emplacement plus discret, est une cuve que l’on appelle les fonts baptismaux. La cérémonie du baptême étant ce qui marque le début de la vie de croyant et l’entrée dans la communauté chrétienne, une grande attention est donc portée à ce rite. Certains lieux de culte possèdent même un baptistère, soit une pièce ou un espace réservé à ce sacrement et séparé du reste de l’église par une grille. Toutefois, on place plus souvent les fonts baptismaux près d’un autel latéral. L’objet, qui peut être en bois ou en marbre sculpté, est constitué d’une cuve sur un pilier, et est parfois fermé d’un couvercle. Le ministre du sacrement puise de l’eau bénite dans la cuve, et en verse sur la tête du baptisé en disant « Je te baptise au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit ».

Beaucoup d’églises québécoises se sont dotées, au début du XXe siècle, de grands orgues placés sur la tribune arrière (qu’on appelle ici « jubé »). Certes, l’orgue n’est pas uniquement réservé aux églises, mais il s’agit de l’instrument de musique liturgique par excellence[1]. Il est d’ailleurs le seul instrument (à part les cloches) à recevoir une bénédiction avant sa mise en service, et à posséder une place fixe et réservée dans les lieux de culte. L’instrument est associé à la musique sacrée depuis la construction des grandes églises gothiques au Moyen Âge; de fait, seules la puissance et la majesté de la musique qu’il produit pouvaient convenir pour ces grands espaces. La structure en menuiserie qui surmonte la console est appelée buffet, et les artisans qui fabriquent l’instrument se nomment facteurs d’orgues. Au Québec, les frères Casavant, de Saint-Hyacinthe, sont des facteurs ayant acquis une grande renommée, et leurs orgues se retrouvent aujourd’hui dans beaucoup d’églises.

Orgue Casavant avec buffet en forme de feuille d’érable. Basilique Notre-Dame-du-Cap, Trois-Rivières.

Clochette d’autel

Je ne parlerai pas ici des cloches, puisque je leur ai consacré un article entier récemment, mais je veux mentionner la clochette ou sonnette d’autel, utilisée dans certaines églises. Il s’agit d’un petit instrument (une ou plusieurs petites cloches groupées) que l’on fait tinter pour marquer ou solenniser des moments forts de la cérémonie, en particulier la consécration du pain et du vin, à l’Eucharistie. Lorsque le prêtre élève l’hostie ou la coupe après avoir prononcé les paroles de consécration, la clochette invite l’assemblée, agenouillée à ce moment, à se recueillir et à prendre conscience du mystère de la Transsubstantiation qui s’opère à ce moment : Jésus Christ devient présent substantiellement, dans le pain et le vin qui deviennent sa chair et son sang.

Corbeille de quête. Source : RPCQ

Je pense enfin à un dernier objet qui pourrait sembler insignifiant à cause de son aspect banal : la corbeille de quête. Alors que le prêtre offre à Dieu le pain et le vin, fruits de la terre et du travail des hommes, pour qu’ils deviennent l’offrande suprême du Corps et du Sang du Christ, chaque chrétien offre aussi un peu du fruit de son travail sous forme d’argent déposé dans un panier en osier. C’est donc à la fois une offrande spirituelle et matérielle, puisque le fidèle participe ainsi au sacrifice de Jésus tout en donnant son soutien aux besoins de son église (mission, pastorale, chauffage, électricité, réparations, etc.). Il perpétue, d’une manière moins radicale, la solidarité et l’esprit de communion des premiers chrétiens, qui mettaient tous leurs biens en commun pour soutenir l’Église naissante.

 

Après ces trois articles, je ne pense pas avoir épuisé le sujet des objets liturgiques, mais j’espère néanmoins avoir amené un peu d’éclairage sur cette dimension du patrimoine religieux dont on ne parle pas dans les médias, et qui peut sembler réservée aux initiés. C’est pourtant un peu à travers ces objets, et par les rites qui y sont rattachés, que l’on touche au sacré, au mystère et à la Tradition… Ces objets, qui étaient d’ailleurs familiers à nos grands-parents, n’appartiennent ni aux sacristines, ni aux prêtres, mais plutôt à notre héritage commun : la culture et l’histoire chrétiennes d’occident.

 

 

[1] « On estimera hautement, dans l’Église latine, l’orgue à tuyaux comme l’instrument traditionnel dont le son peut ajouter un éclat admirable aux cérémonies de l’Église et élever puissamment les âmes vers Dieu et le ciel » (Vatican II, Constitution Sacrosanctum Concilium sur la Liturgie, 1963, n. 120).

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